RAMEUR, édition 2008

 
::     SOMMAIRE
 
  Le mot du canard
(Xavier Ansseau)

  Le mot du Président
(Philippe Trauwaerd)

  Les chevaliers de la route
(Patrick Godard)

  Les Lauréats fédéraux


  La marche de la St Sylvestre 2007
(Nina Sacco)

  Heerlijk om zo te fietesen
(Philipe Trauwaert)

  Mons Chimay Mons 2007
(Nina Sacco)

  Voyage BPF, Aveyron, Tarn-et-Garone
(Pierre Courcelle)

  Hendaye-Dunkerque
(Serge D'agostino)

  Voyage BPF en Corse
(Pierre Courcelle)

  Les Alpes, pour mes 30 saisons
(Patrick Ruelle)

  Grand retour ou timide reprise?
(Yves Pasleau)

  En route vers de nouvelles aventures
(Ph. De Wispelaere)

  60 ans, 30 saisons: quelle année !
(Roland Defrise)

  Jurassic Trip
(Philipe Trauwaert)

 
 RETOUR

EN ROUTE ! VERS DE NOUVELLES AVENTURES…





Nina m’a demandé une petite contribution à la revue que vous avez l’honneur et l’avantage de tenir en vos mains. Elle a eu l’indulgence de me pardonner le récit de Paris-Nice 2006, mieux, elle en redemande, mais cette année, je crains de n’avoir rien d’aussi marrant en magasin.

Voilà, j’ai repris à zéro ou presque, après mon accident de Paris-Nice 2006 et après plusieurs mois de galère, j’ai vu que je pouvais plus ou moins prendre la roue de certains sexagénaires moyennement entraînés du club (disons plutôt : l’emprunter momentanément et avec intérêts prochess de l’usure!).

Alors, l’idée d’aller découvrir le cyclosport à la française. Oui, quelques petites cyclos, pour voir et savoir…

Pour faire plaisir à mon coach vosgien, d’abord Les Trois Ballons (Alsace, Servance et le Grand) en juin, puis un retour au magique Grand Colombier (le Tour de l’Ain, arrivée au sommet) en août, et une petite première/dernière, dans l’Ain encore, la Forestière cyclo, en septembre, histoire de voir.



Les Trois Ballons :

En réalité, je ne l’ai pas faite, mais je vais vous la raconter quand même car finalement je l’ai bien faite, au moins deux fois, de vraies répétitions.

Trois fois je suis allé m’entraîner dans les Vosges au printemps et trois fois j’ai sillonné les routes de montagne de cette cyclo ; j’ai tout fait : le petit Col du Ménil, le Col d’Oderen dans les deux sens, le Bramont, splendide petit col à lacets, la Route des Américains (très rock’n roll, sportif), le bout du Grand Ballon après une magnifique Route des Crêtes qui dévoile à droite les vallées vosgiennes et à gauche la plaine d’Alsace, le méchant Hundsruck, petit mais teigneux, où je serai avalé au sommet par deux pros français en préparation du Giro et par un certain Francis Mourey (s’ils m’avaient dépassé au pied, je suis sûr que je n’aurais pas eu le courage de poursuivre tellement leur allure était supérieure dans ce col que je déteste), le champêtre Ballon de

Servance, sous les ramures des arbres forestiers, et même la Planche des Belles Filles (oui, des belles filles, sans tiret), et enfin le Ballon d’Alsace par Serwen, ses lacs et ses rampes.

Pas un mètre du parcours que je n’aie reconnu dans son intégralité.

De beaux souvenirs, ces deux vieux (enfin, des plus que moi) au sommet du Servance qui ne savent pas pourquoi la Planche des Belles Filles se nomme ainsi, mais me racontent la cueillette des « brimbelles » (« myrtilles » en vosgien) et la vie d’autrefois…

Tiens, vous connaissez l’origine de ce nom alléchant: la Planche des Belles Filles ?

L’histoire vraie n’est guère plaisante.
La Planche des Belles Filles aurait été le théâtre d'un abominable massacre au cours de la Guerre de Trente Ans. Les chefs mercenaires qui menaient cette guerre étaient à la tête de troupes indisciplinées et de toutes origines, qui menèrent des actes cruels et dévastateurs. L'Alsace, les Vosges et la Comté souffrirent des Suédois, qui étaient les plus cruels : pillages, viols, incendies, tueries étaient leurs actes quotidiens et favoris.
En 1635, pendant l'hiver neigeux, les Suédois aux ordres de Mansfeld, chef de guerre brutal agissant pour Richelieu, remontent la vallée du Rahin pour cantonner à Plancher-les-Mines (au pied de la Planche).
Les paysans des vallées du Rahin et de la Savoureuse (côté Belfort), se sauvent dans la montagne de Saint-Antoine avec leur pauvres biens et leur maigre bétail. Les épouses et les filles qui avaient encore plus à craindre des Suédois, continuent leur chemin dans la neige, jusqu'au plus haut sommet du Ballon d'Auxelles, où elles pensaient être en sécurité.


Mais une trahison mena les Suédois jusqu'au refuge des paysans. Le massacre dure jusqu'à l'aube et ils sont tous tués, seul un enfant réussit à s'échapper et court vers les chaumes (sommet du ballon) pour alerter les femmes. Dans la neige, ses traces sont faciles à suivre, et les soldats sont déjà derrière lui. Les femmes comprennent le danger et savent ce qui les attend, d'horribles tortures et la mort, pour les éviter elles dévalent les pentes abruptes du Ballon et se jettent dans un étang aux eaux noires.
Seule une jeune fille aurait échappé à la noyade et aurait rapporté ce récit.


On dit que c'est depuis ce temps, que l'étang et la planche qui le surplombe, portent ce nom de "Belles Filles".
Il y a une version plus légendaire.
Dans la vallée du Rahin, on croyait jadis, que douze fées vivaient au sommet du Ballon d'Auxelles. Les fées, au Moyen Âge, étaient toujours de jolies filles, aussi on désignait le chaume sous le nom de Planche des Belles Filles.
Et une version écolo.
On désignait aussi les grands épicéas qui poussent sur les pentes des Vosges Méridionales, sous le nom de "Fiotte", "Fuotte", "Fue", "Fies", "Fées", etc...Alors parce que les chaumes étaient cernés par de grands fies ou fues, on en vint à désigner la "Planche des Belles Fies", et de fies, ou fées, à "Filles"... seulement quelques glissements …

Voilà vous savez tout des Belles Filles (qu’à Dieu ne plaise !) mais rien de la course et vous n’en saurez rien car un ignoble virus début juin, quelques jours seulement avant le départ, m’a cruellement jeté au lit. Quelle frustration !!!



Le Tour de l’Ain  (15/08/2007) :

Trois cent cinquante participants, dont le futur vainqueur (Michel Roux) à 32 kms/h de moyenne, le Grand Colombier sur la plaque (au début, n’exagérons rien, mais en moins d’une heure quand même), jalousé de beaucoup qui lui envient ses possibilités d’entraînement et sa sponsorisation qui en feraient un pro de l’amateurisme.

Un gars de 45 ans capable de tenir la dragée haute à des jeunes dans la pleine force de l’âge, moi, j’aurais plutôt tendance à l’admirer, il ne peut pas faire cela sans une très grande discipline et s’il a des moyens physiques, comment lui en faire grief ?

Le peloton « sportif » ne l’est pas tant que cela, selon ce que je vois et entends, dans un groupe qui a rallié l’arrivée depuis un hôtel de Lavours, à une grosse dizaine de kilomètres de Belley, une belle bourgade au bord du Rhône, où le départ sera donné, et qui grossit au fil du parcours.

On est loin de l’ambiance conviviale de Paris-Nice.

La cyclo emprunte exactement le parcours de la première étape de la course professionnelle dont le départ sera donné quelques heures après.

L’organisateur prévient d’ailleurs de la fermeture du Grand Colombier à telle heure précise et met en garde contre la mise hors course si les derniers se trouvent en passe d’être rattrapés par la caravane des pros.

Pour moi, il s’agit essentiellement de tourisme. J’ai à cœur de revoir ce sommet magique du Grand colombier et je veux découvrir le versant au départ de Culoz, qu’on dit terrible : deux longs passages de plus de trois kilomètres avec des pourcentages qui flirtent avec les 14%, un petit replat entre les deux, au total environ 18 kms à 7%.

Je me suis placé sagement en fin de peloton mais j'ai été surpris par la brutalité du départ, même là.

Je me suis limité dans mon effort et j'ai accroché un groupe évidemment largué par rapport à la tête mais qui laissait aussi derrière lui un bon paquet de gens ; on a eu pendant environ 1/2 h une moyenne de 38, puis les gars ont marqué sensiblement le pas et je trouvais qu'on aurait dû et pu aller plus vite mais je suis resté bien calé dans le groupe qui n'arrêtait pas de reprendre des gens par l'avant. Quelques-uns sont revenus de l'arrière aussi.

Dans les deux premières côtes tout le monde est resté groupé ou à peu près. On devait former une sorte de « grupetto ».

Dans la côte de Thézillieu (presque 11 kms et un peu plus de 600 m de dénivelé) quelques-uns (6 ou 7) sont partis devant mais isolément, chacun à son effort. Je suis resté tranquille à FC 170 grand maxi, mais il n'y avait plus de groupe derrière. Tout le monde éparpillé. Une noria de points colorés dans la pente. Déjà des cyclos à l’arrêt.

Puis, le plateau, le col de la Lèbe, l’ivresse de la descente, je recolle à un trio, une côte, la descente vers le Rhône.

Peu avant le Grand Colombier, comme le tracé passait à proximité de l'hôtel, je fais un petit détour pour déposer dans ma chambre mon K-way et mon deuxième boyau de rechange, dont je n'avais plus l'utilité (pas de crevaison jusque là, en avoir deux sur 25 kms m'aurait bien surpris).

Lorsque je suis revenu sur le parcours, j'ai retrouvé 2 gars du premier groupe et j'ai commencé l'escalade avec eux. Toujours tranquille.

FC en général vers 167/168, 172 est le maxi que j'ai vu dans les plus gros pourcentages et avec le vent contraire, au-dessus de Culoz, dans les enfilade de lacets au milieu des gros blocs de rochers ; dans les passages moins pentus, je laissais la FC redescendre un peu pour bien assurer.

Mes deux compagnons se sont arrêtés, apparemment épuisés, dans la première portion de 14%.

Il faut dire qu’il a fait chaud toute la journée et que c’est quasi caniculaire dans la pente du Grand Colombier.

La montée était très très sympa car il y avait beaucoup de public venu pour les pros qui passaient après nous (une petite Alpe d'Huez, des mobilhomes et des gens en fauteuils de camping, partout) ; beaucoup d'encouragements et quelques brins de mini-causette (j'ai répondu et échangé quelques mots avec tous ceux qui m'ont parlé).

J'ai revu dans la pente tous ceux qui étaient partis dans Thézillieu (sauf un je crois), quelques-uns à pied, d'autres courageusement arc-boutés sur le vélo et un assis dans l'herbe...



Dans le dernier kilomètre, j'ai fourni un effort pour reprendre deux gars qui venaient d'entrer dans mon champ visuel et que j'ai repris (le deuxième, un jeune homme, s'arrête net et met pied-à-terre à peut-être 150 m de la ligne alors que j'étais sur ses "talons" !!!).

Voilà, j’y suis, la croix, le panorama inoubliable, le public qui applaudit, l’arche d’arrivée : magique, magique…

Le col en 1 h 41, même pas le double du temps de Michel Roux :-) J’avais, il est vrai, des réserves : 130 kms et 2619 mètres de dénivelé, en 6 H 12, avec mon super vélo japonais à 5, 8 kgs, pas vraiment l’enfer, non ?





ll ne me reste plus qu’à redescendre pour le repas servi à Culoz, mais par l’autre côté, vers Artemare, encore une trentaine de kilomètres pour mériter la tartiflette, le rosé, la tarte aux pommes, le café, pour écouter les récits des vaniteux qui refont le monde, et partager quelques émotions avec les purs…



La Forestière cyclo (15/09/2007) :



C’est la première édition de la version « route » d’une épreuve VTT réputée, toujours dans l’Ain, au départ d’Arbent, près d’Oyonnax.

650 participants.

Le brouillard cotonneux et l’humidité s’invitent. On ne voit pas à 100 mètres.

Les gens du coin ne s’inquiètent pas : au-dessus, on aura le soleil…

Au-dessus de quoi, je ne le sais pas encore, je ne me suis pas très intéressé au parcours, je sais que les difficultés sont groupées au début et à la fin, mais qu’il a fallu ajouter des kilomètres en dernière minute pour cause de travaux.

Le départ est lent, une procession, mais la côte est longue, longue, et dure, dure. C’est la côte de Désertin, 15 kms, pour arriver au point culminant de l’épreuve (1000 m). C’est vrai qu’il fait soleil, là-haut…

La montée n’a pas été trop mauvaise, j’ai bien senti que je n’avais pas pu bien m’échauffer, mais je pense avoir grimpé dans une bonne moyenne.

C’est dans la longue et large descente que les choses vont se gâter une première fois : avec mon 48 de grand plateau, mes routes de 650, j’ai beau tricoter et moudre le café, je vois des paquets de cyclos me dépasser, me dépasser, me dépasser…

Heureusement, cette foutue descente prend fin et il y aura encore des cols : le Sentier, le Berthiand.

Je suis stoppé par des incidents mécaniques mineurs, mais j’arrive toujours à revenir sur mon groupe à la faveur de la pente, avec des efforts quand même, mais c’est un plaisir de s’affronter à soi-même, un aiguillon motivant de voir diminuer l’écart et de revenir, mètre après mètre, puis de repasser en tête du groupe juste au sommet.

Les paysages sont grandioses, surtout au Lac Genin et autour de Nantua.

Le ravito de Nantua est lui aussi grandiose ; au buffet et dans l’ambiance : un orchestre à l’accordéon suranné, aux musiciens costumés « début de siècle » (l’autre, le XXème), qui nous gratifie en boucle de l’immortelle « À Bicyclette… » d’un certain bien nommé Montand… mais quelle sympathie, quelle convivialité.

Après 80 kms, ça commence à rigoler moins, je sens se réveiller ma vieille douleur au genou et je dois diminuer la cadence.

Je veux absolument terminer ce parcours splendide, profiter de la vallée de l’Ain même si le vent est contraire.

Je mords sur ma chique en voyant s’éloigner mes compagnons, et je continue à pédaler en m’épargnant, car la douleur augmente.

La dernière côte fera mal mais je tiendrai quand même la roue d’un petit groupe qui m’a rattrapé, puis c’est la descente vers Arbent et l’arrivée, avec une belle ambiance, la remise des trophées, une animation sympa et un repas pas trop dégueulasse...

149,12 kms et 2024 mètres de dénivelée en 5 h 54, mais le retour à l’hôtel est douloureux, même à allure réduite, j’ai vraiment fort mal au genou, finalement, je me rends compte que j’ai terminé de toute justesse et que je n’aurais pas pu accomplir encore beaucoup de kilomètres.











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Voilà, je pourrai dire que j’ai fait partie de quelques pelotons cyclosportifs français et que j’ai terminé, modestement mais honorablement, deux cyclos de montagne.

Finalement, dans les profondeurs du classement, ça n’est pas très différent de nos belges randonnées, mais je regrette un certain esprit de compétition qui vient selon moi un peu pourrir l’ambiance chez quelques-uns. Vive le cyclotourisme qui me convient mieux.

Encore un mot : en tête, cela roule quand même vraiment vite. J’ai une pensée admirative pour ceux de notre club qui se sont distingués dans des épreuves cyclosportives et je leur tire, grande, ma révérence. Chapeau messieurs…



Philippe De Wispelaere